
Abîme / Abîmé
(ou peut-être : Abîmé, selon l’angle de vue)
Une silhouette de femme se dresse, incomplète mais présente, au seuil de la disparition. Le corps s’arrête à la limite du cadre, comme si le regard lui-même avait été tronqué. Ou peut-être préservé. Cadrée juste en dessous de la poitrine, elle devient presque totem, figure à la fois fragile et figée, à mi-chemin entre l’icône et le croquis.
Mais ce sont ses yeux — ou plutôt leur absence — qui donnent toute la profondeur à la toile. Deux percées dans la toile elle-même, deux vides ouverts, deux abîmes. Ce ne sont pas des regards à capter, mais des seuils à traverser. Regarder cette toile, c’est risquer d’y tomber.
Le noir, le blanc et l’or s’entrelacent pour sculpter la matière et le vide, le visible et l’intuition. Comme un souvenir esquissé puis effacé, ou un visage que la mémoire n’a pas totalement laissé partir. Il y a un cadre dans le cadre, une mise en abîme de la perception elle-même : qu’est-ce qu’on regarde, et qu’est-ce qui nous regarde en retour ?
Cette figure nue n’est pas offerte, ni exhibée. Elle est simplement là, tenue par une tension douce entre pudeur et présence.
Acrylique sur toile
30x40